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Lors de la Journée internationale contre Homo, Lesbo, Bi et Transphobia, nous aimerions décrire comment la phobie LGBT + a été vécue par un catholique LGBT dans sa paroisse locale et comment il s’en est remis.

Je vivais avant dans une ville française autre que celle où je vis maintenant. Une église m’y était particulièrement chère. Lorsque je suis arrivé en France en provenance d’Australie, c’est là que j’ai découvert la merveilleuse profondeur spirituelle que l’on peut trouver dans certains endroits en France : un grand contraste avec l’Australie de cette époque-là. Pendant environ huit ans, j’ai chanté dans leur chorale et j’ai adoré leur liturgie si belle et inspirante.

Lorsque j’ai rencontré mon compagnon, j’ai déménagé dans un autre quartier de la ville, mais je traversais la ville pour aller à la messe dans mon église préférée. Mon compagnon aussi aimait cet endroit et nous y allions ensemble, de temps en temps, pendant de nombreuses années. Comme il voulait être le plus près possible de l’autel pendant la messe, nous avons choisi un endroit approprié, un endroit où nous étions particulièrement visibles.

Puis, un dimanche à la messe, nous étions assis à notre place spéciale et au moment de ‘donner la paix,’ je me suis tourné en souriant vers la femme à côté de moi pour lui serrer la main. Elle a fait une grimace de dégoût et a secoué la tête, refusant de me prendre la main. Je suis resté là, debout, à lui tendre la main, avec mon sourire stupide toujours sur le visage.

Quelques semaines plus tard, nous étions assis au même endroit avant le début de la messe. Le jeune prêtre allait et venait pour préparer les choses quand soudain il nous a remarqués. Il s’est précipité vers nous et nous a dit : « Qui êtes-vous ? Qu’est-ce que vous faites ici ? » Nous avons été estomaqués. Quand il a vu à quel point nous étions étonnés, il a changé de ton : « Je veux dire : êtes-vous de la paroisse ? Vous venez souvent ici ? » Nous lui avons répondu que nous n’étions pas de la paroisse et que nous allions à la messe dans cette église de temps en temps. Cela semblait le calmer et il s’est éloigné. Nous avons supposé que la femme s’était plainte auprès de lui qu’il y avait un couple gay effronté qui osait se présenter à la messe et s’asseoir dans un endroit bien visible. À partir de ce moment-là, nous sommes allés nous asseoir ailleurs.

Dans notre lieu plus anonyme, nous avons parfois remarqué un comportement d’évitement. Par exemple, un couple d’hétéros vient à notre banc comme pour s’asseoir, ils nous voient assis là tous les deux et décident d’aller un peu plus loin.

Peu de temps après, en 2011, mon compagnon est décédé et j’ai continué à aller à cette église, tout seul. L’année suivante, le gouvernement s’est mis à annoncer qu’il allait faire passer une loi en faveur du ‘mariage pour tous’ et la hiérarchie catholique a réagi énergiquement contre cette mesure. Des trains et des bus spéciaux ont été organisés pour emmener les gens à Paris pour des manifestations monstrueuses, où des slogans homophobes ont été scandés et quelques slogans racistes également, puisque le ministre de la justice en charge de la nouvelle loi était une femme noire.

Ainsi, le jour de Noël 2012, je suis allé à mon église préférée. Un autre jeune prêtre a dit la messe et a fait une homélie qui n’était pas seulement contre la loi prévue mais qui était nettement homophobe, avec un refrain désagréable répété à maintes reprises. À la fin de l’homélie, je me suis levé et je suis sorti. J’étais dévasté. Les dimanches suivants, je me suis rendu dans d’autres églises, mais partout le thème était la lutte contre ‘cette loi abominable’. La loi a finalement été votée en mai 2013.

Depuis le vote de cette loi, la hiérarchie catholique en France a compris que la civilisation ne s’est pas effondrée, que la vie familiale n’a pas été disloquée et que le ciel ne nous est pas tombé sur la tête. Ils montrent des signes de vouloir compenser le mal qui a été causé par leur attitude et ils essaient de reconquérir les personnes qu’ils avaient chassées. Environ un tiers des diocèses en France offrent désormais un soutien pastoral efficace aux personnes non-hétérosexuelles et leur nombre augmente.

En 2014, un colloque théologique intitulé The Ways of Love, sur la pastorale des LGBT catholiques, a été organisé par les personnes qui allaient créer le GNRC. On m’a demandé de traduire en français certains des documents faisant la promotion de cet événement. Une fois mon travail terminé, j’ai eu un soudain accès de colère et j’ai envoyé ces documents par e-mail au jeune prêtre avec le titre « En souvenir de votre homélie de Noël 2012 ». J’ai été surpris de voir, quelques jours plus tard, qu’il m’a répondu : il a dit que son attitude avait beaucoup changé depuis cette homélie. Je lui ai suggéré de lire le livre de Claude Besson sur les catholiques homosexuels (Homosexuels catholiques, sortir de l’impasse, 2012 ). Quelques jours plus tard, il m’a répondu qu’il avait lu le livre, qu’il l’avait aimé et qu’il le recommanderait à son entourage.

Après quelques semaines, je me suis finalement aventuré un dimanche dans cette église. Après la messe, je suis allé voir le prêtre et je me suis identifié comme la personne qui lui avait envoyé les e-mails. Il était un peu gêné, mais je lui ai dit : « Vous savez, pour les hommes gays comme moi, l’Église catholique est notre famille. La vie dans une famille n’est pas toujours facile. Mais c’est toujours notre famille ». Il n’a pas répondu, mais j’ai considéré que l’épisode était clos.

Il est important pour nous, gens de la ‘périphérie,’ de continuer à fréquenter l’église et de nous rendre visibles. Nous devons montrer que nous aussi, nous sommes là chez nous. Maintenant je suis marié légalement et chaque dimanche je vais avec mon mari à une église où nous nous sentons assez bien accueillis, mieux accueillis par certains que par d’autres, mais notre présence là fait partie de notre lutte pour la reconnaissance.

                                                                                                          Michael Clifton

Sur l´Autheur : Michael Clifton est le délégué GNRC de David et Jonathan en France. Il est né en Australie mais a déménagé en France au début des années 70. Il est actuellement marié et vit à Nancy, en France.